John Armleder – Jean Carzou

Cercle Spiridion  John Armleder – Jean Carzou

John Armleder – Jean Carzou

Le Cercle Spiridion présente à la Galerie Richard Paris et New-York

JOHN M. ARMLEDER / JEAN CARZOU

Cécile Calé Curator

Mai 2014

 

 

« … C’est bien pour cela que je célèbre avec obstination des artistes jugés comme mineurs,  Jean Carzou par exemple parce que je pense que fondamentalement Malévitch sans Carzou n’existerait pas. A vrai dire, j’ai une capacité de sympathie pour à peu près tout… Je ne crois pas à la question du bon et du mauvais goût. Quelque part, ces formes de disqualifications m’alertent dans la mesure où je suis persuadé que ce sont les mêmes raisons ou les mêmes ingrédients qui vont permettre de célébrer ou de déconsidérer telle ou telle œuvre. Pour un objet artistique c’est la même mécanique, le même schéma. Entre la valeur ajoutée et la valeur diminuée, le jugement procède exactement des mêmes principes, il n’y a aucune différence». John Armleder. La création contemporaine. Flammarion.

 

Le jeune Karnik Zouloumian, né en Syrie à Alep en 1907 s’installe en Egypte avec sa famille arménienne, poursuit de brillantes études au Caire. A 17 ans il rejoint Paris, entreprend des études à l’Ecole spéciale d’Architecture, il en sort diplômé  en 1930, fait «  des ronds et des carrés » à Montparnasse, devient Jean Carzou par souci d’intégration. En très peu de temps avec ses décors de l’Opéra de Paris (avec Roland Petit), ceux oniriques de la Comédie française, les décors de théâtre des années 50,  le peintre artisan Jean Carzou devient une des plus grandes figures du monde de l’art : un « house hold name ». La revue Connaissance des Arts le classe d’ailleurs en 1955 parmi les dix peintres les plus importants de sa génération.

 

Son style graphique, acéré, acquiert une immense popularité – nous sommes dans les décennies 60/70  – dont plus aucun artiste français ne bénéficiera depuis. Fer de lance de la figuration alors que dans le même temps Georges Mathieu et Victor Vasarely règnent sur l’abstraction. C’est à ces trois artistes « trademark », à ces trois créateurs de style que la station de radio  RTL propose de concevoir le nouveau design de la façade rue Bayard à Paris. La station RTL choisie en 1972 le motif Op Art de Vasarely qui illustre à l’évidence les années 70, la technophilie et la modernité des années Georges Pompidou.

John M Armleder (né à Genève en 1948) «Fondateur en 1969 à Genève, avec d’autres artistes proches de Fluxus, du groupe Ecart et de la galerie du même nom,  présente dans la galerie JL Richard NY cette maquette de Jean Carzou, oubliée depuis quarante ans : un moucharabieh, un élément architectural ornemental ayant traversé le temps, où l’on retrouve les motifs du machinisme onirique de ses peintures.  Une résille à laquelle l’architecture contemporaine a rendu raison, ce concept devient omniprésent dans l’architecture, telle la peau d’aluminium du new Museum (SANAA 2010).

John M Armleder a développé une œuvre incroyablement subtile et complexe. Sa démarche repose sur l’idée que les choses ont déjà eue lieu et que son art s’élabore avec celui qui l’a précédé. Il œuvre par stratégie de brouillage et de dé-hiérarchisation, reconsidère ici l’œuvre de Jean Carzou, prend le risque de réévaluer l’œuvre de cet artiste désormais relégué au rang de peintre mineur après la gloire des sixties et des seventies.  Certains expliquent cette déconsidération par des nécessités économiques ayant conduit à son remplacement, John Armleder pense que l’on peut toujours trouver de bonnes raisons pour célébrer une œuvre et tout aussi bien de bonnes raisons pour disqualifier cette même œuvre.  Ce sont les constructions culturelles et pas seulement marchandes qui ont valeur d’estimation.  On retrouve ici le principe d’équivalence cher à Robert Filliou.

John M Armleder choisit d’associer « Les ronds et les carrés » du très jeune Carzou aux « Pour and puddle painting ». Les métapeintures, inconnues d’un artiste-artisan très connu, puis très discuté et rejeté –il s’appliquait alors pour faire ces images d’abstraction, une illustration des années 30 – voisinent dans un tremblé et un espace temporels les splendides « pour and puddle paintings », leur fureur calme.

 

On aura du mal à imaginer que Jean Carzou et John Armleder furent des contemporains. Carzou au faite de sa fortune, Membre de l’Académie des Beaux Arts, avait commis quelques imprudences en condamnant sans appel Picasso et même Cézanne, synonymes à ses yeux de « la décadence de la peinture ». Ces prises de positions radicales lui valurent une grande hostilité du monde de l’art. C’est dire l’audace délestée de toute ironie de John Armleder, il mise gros à célébrer un vaincu. Dans son autobiographie Jean Toussaint Desanti expliquait que le philosophe est celui qui a chaque fois mise la totalité des acquis, de ses acquis. « Un philosophe est un flambeur », il se doit de remettre en jeu son savoir, ses idées, à chaque fois.

 

Pas de confort et donc pas de cette économie restreinte des ironistes qui thésaurisent avec assurances incluses. Il faudra frayer de nouvelles généalogies pour ajuster la coprésence de Jean Carzou et de John Armleder. Seulement présente et encore très modestement l’intelligence déconcertante du très cultivé John Armleder.

 

 

Faites à plat comme des flaques puis relevées, leur exécution résulte de décisions immédiates, de mélanges de peintures, de laques et vernis divers. L’évolution est aléatoire sous l’effet des différents composants chimiques et de leur manipulation. Les peintures montrent clairement leur stratégie de fa­bri­ca­tion : un geste par lequel l’échec, l’abandon ou la réussite reviennent au même. Tout l’art de John Armleder  se défie de l’intention, ne pas afficher ni  programmer des intentions, mais au contraire et régulièrement les remettre en jeu et les destituer de leur autorité. On songe aux dendrites de George Sand   (qu’aurait très bien pu illustrer Jean Carzou) qui s’inscrivent dans l’histoire des images naturelles et accidentelles utilisées ou produites par les artistes pour stimuler leur imagination.  George Sand n’utilise alors le hasard que pour créer des paysages, pour « faire de la nature » , « pour la faire vraie ».  Il s’agit de la volonté de produire des images qui pourraient ou ne semblent pas être faite de main d’homme, produire des images et non produire du sens. Des choses qui se font toutes seules, des images acheiropoïète  dit-on depuis Cicéron.

Un artisanat modeste et madré pour en finir avec les vanités de la subjectivité. On pourrait tracer une histoire de la subversion de ces modestes, de la capacité de leurs choses à agir à retardement.  Leurs capacités à, tout aussi, épuiser les idéologies qui les ont vues naître sont ce que nous nommons Art.

 

Cécile Calé.

Curator  & Art Advisor , Paris, Mai 2014.

John M Armleder est né le 24 juin 1948 à Genève, vit et travaille à Genève (suisse)  et New York (États-Unis), est un performeur, peintre et sculpteur, est connu pour son engagement dans le groupe Fluxus et le mouvement néo-géo. Il étudie à l’École des beaux-arts de Genève entre 1966 et 1967.

John Armleder, aux côtés de Patrick Lucchini et Claude Rychner, est le fondateur de la galerie Ecart, lieu de performance et maison d’édition indépendante qui fait venir plusieurs artistes célèbres en Suisse, comme Joseph Beuys et Andy Warhol.

Les débuts en art de John M Armleder (John Michael Armleder, dit) s’effectuent sous le signe du collectif. En 1969, il constitue à Genève, aux côtés de Patrick Lucchini et Claude Rychner, le groupe Ecart, qui développe ses activités dans un local tenant lieu à la fois de galerie, de librairie et de maison d’édition. John M. Armleder y accueille notamment le visiteur avec une tasse de thé, l’invitant à une discussion sur l’esthétique. Durant les années 70, la pratique performative de l’artiste est ainsi marquée par l’esprit néo-dada de Fluxus, qui cherchait à annuler les frontières entre l’art et la vie. Cette séance de tea time constitue également l’une des premières manifestations de ce que Nicolas Bourriaud appellera l’esthétique relationnelle.

Armleder accède à la reconnaissance internationale au cours de la décennie suivante avec les Furnitures Sculptures, œuvres hybrides associant peinture et mobilier et témoignant d’une totale rupture avec le grand récit moderniste de l’autonomie de l’œuvre d’art. Armleder manipule, sans souci de hiérarchie, tableau abstrait, phare antibrouillard, bureau, guitare électrique ou boule à facette, le tout se côtoyant selon un principe d’équivalence généralisée. L’objet utilitaire est élevé au rang de sculpture, moins dans une logique de transgression que de mise à mal de la valeur artistique. Tour à tour associé au mouvement Néo Géo, à l’appropriationnisme ou à la Commodity Sculpture, le travail d’Armleder échappe cependant à toute tentative de classification en convoquant un vocabulaire plastique hétérogène, qui semble souligner l’inévitable réification de l’art, la fatalité de procéder à son propre pastiche. Emblématique de l’ère postmoderne, la démarche d’Armleder affirme la valeur décorative de l’art, le spectateur traversant un environnement spectaculaire, dont les éléments semblent interchangeables et vides du moindre message. Michel Gauthier qualifie cette défiance envers la portée discursive de l’œuvre de « formalisme postmoderne ».

Dans le grand brassage stylistique qui caractérise l’œuvre d’Armleder, la peinture abstraite tient une place essentielle. Il se réapproprie le vocabulaire classique de l’abstraction, ses bandes, cercles ou coulures, et en produit une version édulcorée, son parfait cliché. L’impression léchée de la finition des tableaux et leurs couleurs chatoyantes semblent mettre à distance toute expression personnelle, refoulant ainsi le geste héroïque du peintre, réduit ici à un remplissage de surface. Mélanges de kitsch et d’une désinvolture de dandy, les peintures ne constituent plus qu’un élément décoratif parmi d’autres. Aux alentours de 2000, son travail est marqué pour la première fois par un recours à la figuration sous la forme de têtes de mort, de fleurs ou de méduses.

Cécile Calé & Claude Darras.

Cercle Spiridion.

Jean Carzou (Karnik Zouloumian), est né en Syrie à Alep en 1907 s’installe en Egypte avec sa famille arménienne, poursuit de brillantes études au Caire. A 17 ans il rejoint Paris, entreprend des études à l’Ecole spéciale d’Architecture, il en sort diplômé  en 1930, fait «  des ronds et des carrés » à Montparnasse, devient Jean Carzou par souci d’intégration. En très peu de temps avec ses décors de l’Opéra de Paris (avec Roland Petit), ceux oniriques de la Comédie française, les décors de théâtre des années 50,  le peintre artisan Jean Carzou devient une des plus grandes figures du monde de l’art : un « house hold name ». La revue Connaissance des Arts le classe d’ailleurs en 1955 parmi les dix peintres les plus importants de sa génération.

 

Cécile Calé & Claude Darras.

Cercle Spiridion.

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Expositions